Mesdames, Messieurs,
L’annonce de la démolition imminente de la chapelle Saint-Joseph à Lille commence à faire de plus en plus de bruit dans les médias nationaux et sur les réseaux sociaux. Ce bruit sera d’autant plus retentissant quand les pelleteuses commenceront à grignoter l’édifice et, ce jour-là, il sera trop tard.
Trop tard pour sauver ce symbole de la religion catholique, symbole de la présence de la communauté Jésuite de Lille, symbole de notre histoire collective.
Urgences Patrimoine a œuvré sans relâche depuis le mois de mai pour sauver la chapelle Saint-Joseph, mais nous avons, semble-t-il, échoué. À l’annonce du résultat du référé que nous avions déposé au Tribunal Administratif de Lille, j’ai nommé ce combat acharné contre les démolisseurs « le combat de la solitude », car même si nous avons eu le soutien de nombreux professionnels de la culture et du patrimoine — notamment celui de 106 Universitaires du monde entier — il nous aura manqué celui de des catholiques de France.
Certes, pour justifier cette démolition certains diront que cette chapelle était abandonnée depuis longtemps, désacralisée de surcroit et, surtout, que l’Église n’est pas un édifice : l’Église ce sont les fidèles.
Pourtant, comme vous pourrez le lire dans le texte suivant, cette immense chapelle a été désirée et érigée avec ferveur à la gloire de Dieu au prix de bien des sacrifices de la communauté catholique de l’époque.
Alors a-t-on le droit aujourd’hui de démolir sans vergogne ce que les hommes d’hier ont construit à la gloire du très-haut, au nom d’une modernité sans âme et dans une démarche mercantile ?
Certes, c’est pour laisser place à un campus que l’Université Catholique de Lille va détruire l’édifice et, de nos jours, l’enseignement est un moyen d’élévation certain : mais fallait-il pour autant sacrifier la chapelle Saint-Joseph ?
D’autant qu’il est important de rappeler que dans ce cas précis, ce n’est pas par manque de moyens financiers que la chapelle sera détruite, puisque sa réhabilitation aurait été moins onéreuse que sa démolition/reconstruction. Non, il s’agit là uniquement d’un manque de désir, et de volonté avec sans doute, pour des raisons qui nous échappent encore, l’envie de faire table rase du passé avec pour seul argument qu’il faut, lorsque l’on vise l’excellence, être résolument tourné vers l’avenir, peu importe le prix à payer et même si c’est celui de la disgrâce. Mais, dans notre société actuelle ,l’institution catholique elle-même semble être plus sensible aux sirènes de la promotion immobilière qu’à celles de la spiritualité.
Pourtant, cette chapelle est remarquable et elle aurait dû le rester. D’ailleurs, pour vous donner une idée plus précise de sa valeur architecturale, voici la description faite le jour de son inauguration :
Nous avons à plusieurs reprises demander le soutien des représentants de l’Église. Certains nous l’ont apporté, mais hélas, n’ont pas souhaité le faire officiellement par crainte de leur hiérarchie et nous le regrettons, car leur soutien officiel nous aurait probablement aidé. Voici d ‘ailleurs un très gentil message qu’un prêtre m’a envoyé, mais son auteur doit rester anonyme :
« Merci pour votre combat pour La Chapelle Saint Joseph de Lille. Un combat n’est jamais perdu et croyez bien que Dieu se sert de nos générosités pour répandre ses grâces. La Chapelle sera détruite, crève-cœur pour bien des motifs mais au Ciel vous serez certainement surprise de voir que votre action a porté quantité de fruits et permis ça et là de faire du bien. Ne vous découragez pas et merci pour tout ce que vous faites. »
Ce message comme tant d’autres m’a beaucoup touché, mais cette peur de la hiérarchie nous a privé de ce genre de précieux soutien.
Quant au soutien du Saint Père que nous avons sollicité au lendemain de son annonce de sa volonté que cette année soit dédiée à Saint Joseph, nous l’attendons encore et nous savons bien qu’aucune réponse de la part du Vatican ne nous sera faite.
C’est pourquoi aujourd’hui, j’en appelle à toute la communauté catholique afin qu’elle se mobilise à nos côtés et qu’elle ne se contente pas d’assister sans rien dire à la démolition de la chapelle Saint-Joseph. Dans la période trouble que nous vivons, la démolition d’un édifice religieux n’est pas la bienvenue. Tout d’abord, parce que de nombreux catholiques se sentent offensés, mais également, parce que cela pousse « à la haine de l’autre » et nous le savons tous. Il suffit de regarder les réactions lorsqu’un symbole de la religion chrétienne est vandalisé ou souillé. Tout le monde crie à la « christianophobie ». Mais lorsque c’est l’institution catholique elle-même qui détruit un de ses symboles il faudrait se résigner et accepter sans rien dire ? Je ne le pense pas. Je pense qu’il est temps de faire entendre vos voix auprès de toutes les instances compétentes qui pourraient encore sauver la chapelle Saint-Joseph.
Prenons l’exemple de cet adhérent d’Urgences Patrimoine qui vient d’écrire à Monseigneur Ulrich et qui nous a autorisé à publier un extrait de son courrier :
« Monseigneur,
Les derniers recours ont été épuisés, et la justice autorise donc la destruction de la Chapelle Saint Joseph, après des mois de combat mené par quelques-uns, l'association Urgences Patrimoine en première ligne. Il semble bien que l'Eglise, et le Diocèse de Lille, ont brillé par leur absence et n'ont pas su, ou pas voulu, soutenir ceux pour qui la sauvegarde de ce bâtiment remarquable était importante. Peut-être saurez-vous me rassurer et m'apporter des informations et explications qui justifieraient d'en être arrivé à cette destruction, une de plus...
Dans cette attente, je ne vous cache pas que je considérerai à l'avenir avec plus d'attention la possibilité de verser un don annuel au Diocèse. »
Je vous invite donc tous à faire de même. Par respect pour ce témoin remarquable de notre histoire, mais aussi et surtout en mémoire de ceux qui l’ont érigé, au prix de nombreux sacrifices. Enfin, en mémoire de tous ceux qui ont été instruits dans cette institution et qui sont devenus des hommes élevés dans le respect de la religion catholique.
Terminons par le témoignage de Monsieur Thierry Prouvost dont la famille a participé à l’époque au financement de l’édifice.
Le cas de la chapelle Saint-Joseph n’est hélas pas un cas isolé et nous sommes confrontés chaque jour un peu plus aux risques de démolition de nombreuses églises et chapelles.
Pour lutter contre ces démolitions nous avons besoin du soutien du plus grand nombre d’entre vous. C’est la raison pour laquelle je vous invite à nous rejoindre au sein d’Urgences Patrimoine en devenant membre.
Certes nous savons que les sollicitations sont nombreuses, mais dans notre cas, il s’agit d’un montant de 9 euros. 9 euros pour lutter contre les démolisseurs et espérer voir les témoins de notre histoire collective s’inscrire dans l’avenir.
Alexandra Sobczak-Romanski
Présidente d’Urgences Patrimoine
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