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En cette fin de mois d’août, nous aurions pu faire l’éloge de ce fleuron du patrimoine national qu’est la ville de Saint-Malo. Ses remparts, ses plages, son port et son histoire maritime connus de tous.




Or, c’est un tout autre visage qu’offre la ville, si l’on s’égare en dehors du centre historique.



Une ville ravagée par la promotion immobilière qui est tout bonnement en train de la défigurer. Écoles, presbytères, anciens commerces, maisons de pays, tout est détruit depuis quelques années au profit d’immeubles sans âme où vont s’entasser parisiens en mal d’air iodé ou retraités fortunés.



C’est lors de la mandature du maire précédent que les démolitions ont été les plus nombreuses. Rien que sur l’année 2019/2020, plus de dix chantiers de démolition ont eu lieu ou sont en cours.



Le quartier le plus touché, est celui de La Gare/Rocabey. Progressivement les bâtiments "historiques" et les maisons disparaissent au profit de barre d'immeubles.



A Saint-Malo, on ferme et on démolit les écoles au profit d'immeubles (2 ou 3 écoles ont déjà disparues et il est bien probable que la liste continue a s'agrandir).



Pendant 6 ans, la municipalité a véritablement "bétonné" la ville de Saint-Malo à tour de bras, faisant démolir sans état d'âme (pour le bien de Saint-Malo d'après eux) des quartiers entiers pour faire place à des barres d’immeubles de plus en plus hautes.



Il va sans dire que la ville est devenu la proie de promoteurs immobiliers qui vont jusqu'au harcèlement de certains propriétaires de maisons, pour les encourager (pour ne pas dire forcer) à vendre leur maison comme le dénonce cet article ICI.



La démolition la plus scandaleuse fut celle d'une malouinière du XVIIIe siècle (les malouinières, sont un style de villa, construite par de riches commerçants et négociants au XVIIIème siècle, à St-Malo et ses alentours). Cette villa portant le nom "Tourville" a donc été rasée sans remords et dans la plus grande discrétion, il en fut de même pour la maison voisine, une très jolie villa du début du XXe siècle. A vrai dire, c’est toute une série de maisons (en tout 4 maisons) qui a été rasée pour faire place à une barre d'immeuble extrêmement haute.



En ce moment même, c'est au tour du dernier cinéma historique de Saint-Malo d'être démoli (le cinéma Vauban, construit au début des années 50).

Juste à côté du cinéma eu lieu aussi la démolition du presbytère (datant du XIXème siècle) de l'église Notre-Dame-des-Grèves.



Un autre exemple assez frappant est l'Avenue Franklin Roosevelt, qui est devenue progressivement le fief du groupe Roullier (Société TIMAC). Plusieurs bâtiments sont sortis de terre, et une avenue toute neuve a été tracée (alors même qu'un nombre incalculable de rues de St-Malo sont dans un état déplorable).



Enfin, comme si démolir ne suffisait pas, les deux musées de la ville sont fermés depuis novembre 2019, laissant la Tour Solidor et le Grand Donjon vides et sans destination.


Les collections ont été mises en réserve et la seule bonne nouvelle est que la majorité des œuvres ont été restaurées.



Cette campagne de restauration a d’ailleurs duré de nombreuses années, vidant un peu plus à chaque fois les deux édifices. Une fois restaurées, les œuvres ne retrouvaient pas les collections des musées, mais les réserves.



Lire l’article au sujet de la fermeture des musées ICI.


Pourquoi ? parce que là encore, un projet que l’on pourrait nommer « d’envergure », ou plus objectivement issu d’un délire mégalomane, devrait voir le jour en 2022. Pour un montant pharaonique alors même que l'on se demande comment la commune va pouvoir financer un si lourd projet. D'autant plus en la période de crise que nous connaissons actuellement. C’est d’ailleurs le projet d’un célèbre architecte japonais qui a eu grâce aux yeux de l’ancien maire. C’est donc dans ce bâtiment que les collections seront (un jour peut-être) rendues au public.



Voir le projet  ICI.




Encore une fois, nous n’avons rien contre l’architecture contemporaine, et il faut que le XXIe siècle laisse lui aussi son empreinte, mais nous ne sommes pas certains que ce bâtiment s’intègre bien au paysage.



Nous sommes désolés d’avoir entaché l’image de cette ville qui fut jadis magnifique, et qui gardera tout de même un potentiel touristique incontestable (si, bien entendu, la « démolitionnite aigüe » cesse. Nous ne sommes pas certains que les touristes continuent d’affluer pour admirer des immeubles en béton.



D’ailleurs, la « démolitionnite » est toujours d’actualité avec le projet de démolition de l’ancien camping. Mais les associations locales sont vent debout contre le projet et pour le moment tout est à l’arrêt. Lire l’article d'Ouest France ICI




Espérons que ces dernières auront gain de cause. Sinon, l’on pourra définitivement changer le nom de la ville en la nommant : « Saint-Mal-loti »


À Maubeuge, dans le projet « Action cœur de ville » les démolitions ont la part belle. Nous savons que nous allons encore nous faire traiter de « réacs », mais les bâtiments victimes d’un « modernisme exacerbé » auraient pu faire l’objet de réhabilitations intelligentes alliant sauvegarde de l’existant et modernité.



Ce ne fut pas le choix de la municipalité qui semble prendre beaucoup de plaisir à détruire certains témoins du passé glorieux de la ville. Ces bâtiments, aujourd’hui condamnés, étaient pourtant les seuls à avoir résisté dans cette rue aux bombardements pendant la seconde guerre mondiale. Mais peu importe l’Histoire à Maubeuge, on démolit sans état d’âme.



L’édifice principal de ce que l’on appelait « l’îlot Lecluyse » avait ouvert le bal des démolitions en 2008.



C’est au tour des derniers vestiges de ce lieu de sombrer depuis quelques jours sous les pelleteuses. À l’heure où nous écrivons ces lignes, tout doit être par terre.



Nous ne comprenons toujours pas pourquoi dans le dispositif « Action cœur de ville » le patrimoine est à ce point mutilé, mais nous ne pouvons assister qu’impuissants à la poussée d’immeubles cubiques en lieu et place d’édifices de caractère, souvent centenaires. Quelle sera la durée de vie de ces blockhaus modernes ?




Probablement une vingtaine d’années et dans vingt ans, on rasera et on recommencera.



Certes, cela crée des emplois dans le BTP, mais concernant l’attractivité touristique, nous émettons quelques doutes. Enfin, à l’heure où l’on nous parle sans cesse d’écologie, nous ne sommes pas certains que la démolition-reconstruction soit une démarche très écolo.



L’avenir nous le dira, mais en attendant, à Maubeuge comme ailleurs, c’est encore et toujours « Du passé faisons table rase ».



À lire l’émouvant témoignage d’un habitant du quartier ICI.

Bien entendu, ce titre est une hérésie. Hérésie qui pourrait peut-être devenir une réalité, car du côté de chez Swann, sur les terres de Marcel Proust, l’ombre d’un méthaniseur rôde. Nous avons été alertés par Christine Cloos, une amoureuse de ce territoire et nous relayons sans tarder ces inquiétudes. Christine Cloos est peintre-sculpteur et vient de signer son premier roman policier aux éditions des Falaises, Meurtres en série à Giverny.


La ville d'Illiers-Combray et ses alentours ont marqué fortement l'enfant Marcel Proust lors de ses séjours dans la maison de sa tante Léonie et ce paysage est lié intimement à La Recherche du temps perdu. Son œuvre littéraire en porte la trace profonde et fondamentale.



A 5 kms d'Illiers-Combray se situe un cercle de châteaux, certains décrits par Proust, comme le château de Méréglise (le Méséglise de la Recherche) ou le château de Saint-Eman (le Guermantes du roman) qui se situe sur la route des lavoirs, aux sources du Loir. Tout à côté, se trouve le ravissant château des Forts ainsi que le château du Rouvray.



« Comme mon père parlait toujours du côté de Méséglise comme de la plus belle vue de la plaine qu’il connût et du côté de Guermantes comme du type de paysage de rivière, je leur donnais, en les concevant ainsi comme deux entités, cette cohésion, cette unité qui n’appartiennent qu’aux créations de notre esprit » (Du côté de chez Swann).



Or, au milieu de ce cercle de châteaux et de ses lieux de mémoire, au sein de ces balades proustiennes, le projet d'une usine de méthanisation à 3 cuves, initié par sept agriculteurs de la région, va peut-être voir le jour. Le terrain de son implantation est situé dans la zone classée « remarquable » par le maire d’Illiers-Combray, et directement dans la perspective du clocher de l’église Saint-Jacques (La Sainte-Hilaire de Proust) qui est visible à 10 kms à la ronde dans cette partie de la Beauce pleine de charme, très boisée, puisque jouxtant le Perche. « C'était le clocher de Saint-Hilaire qui donnait à toutes les occupations, à toutes les heures, à tous les points de vue de la ville, leur figure, leur couronnement, leur consécration » (Du côté de chez Swann).



Ce méthaniseur est prévu proche d’un élevage industriel de porcs, ainsi le lisier produit par cet élevage serait directement recyclé dans l’usine. Le propriétaire de cet élevage est aussi adjoint au Maire à Illiers-Combray.



Cet élevage industriel défigure le paysage avec sa haute tour métallique mais il a été construit bien avant le classement du site …. Ce digestat sera étalé sur plus de 2000 hectares, ce qui engendrera une pollution des sols et des rivières, et une destruction des petites routes de campagne non adaptées aux passages incessants de véhicule lourds et une nuisance sonore extrême pour les habitants de tous les petits villages tranquilles concernés.



Les habitants du village des Dauffrais seront les plus proches voisins (400 m) de cette usine à gaz et en subiront toutes les nuisances qui sont très nombreuses (visuelles, sonores, olfactives avec tous les risques bactériologiques, sanitaires et accidentels qu’une telle installation engendre : dispersions toxiques, fuites de méthane, explosions, incendies, risque de contamination de la nappe phréatique, impact sur la santé, etc.) La liste des préjudices engendrés par de telles installations est longue et effrayante… Les accidents sont fréquents et les riverains de ces méthaniseurs sont victimes de graves problèmes de santé (maladies pulmonaires, etc….).



Le village des Dauffrais possède de nombreux vieux puits, dont les eaux risquent d’être contaminées. Il y existe encore la modeste maison natale à colombage du philologue et grammairien Eman Martin (1821-1882).



Les communes de Blandainville, Montigny-Le-Chartif et Vieuvicq sont concernées par le projet d'implantation des poches de digestat. Méréglise, Mottereau et son château, se trouvent à 1 km de ces poches.



Cette région est aussi, à l'instar de Proust, la région de mes vacances d'enfance. Mais au-delà de cet aspect personnel, je suis réellement effondrée de voir ce paysage proustien qui risque d’être massacré et sacrifié sur l’autel du profit. Car il s'agit bien de profit et non d'écologie. Dans un extrait du dossier de consultation publique, on peut lire ces chiffres : 



Coût du projet : 8 millions d'euros. En 2035 : résultats nets cumulés 1 968 640 euros



La plaine de Beauce est vaste, parfois désertique, vaste étendue à perte de vue sans habitations.... Pourquoi sacrifier des lieux patrimoniaux de cette qualité…. ?



Je voudrais ici citer un article qui exposait l'état d'esprit du maire d'Illiers-Combray à propos d'un projet d'éoliennes à Méréglise :



« Le maire d’Illiers-Combray lui-même, qui pour consacrer « le lien exceptionnel entre ces paysages et l’œuvre littéraire de Marcel Proust », est à l’origine de la création récente sur sa commune d’un site patrimonial remarquable. Ce dispositif a permis l’intervention de l’architecte des Bâtiments de France, qui a rendu en septembre 2019 un avis défavorable, dénonçant la « concurrence visuelle trop forte » que créerait ces éoliennes sur la vallée, et en particulier sur le bourg d’Illiers-Combray. (…..) Très attaché à la mise en valeur de ce patrimoine à la fois naturel et culturel, le maire d’Illiers-Combray a également été l’initiateur, en 2019, de la grande manifestation intitulée « Le printemps proustien », venue célébrer le centenaire du prix Goncourt du héros local. Parrainé par Stéphane Bern, l’évènement a attiré plus de 20 000 spectateurs. Un maire déterminé donc, qui ambitionne de développer à Illiers-Combray un véritable « tourisme littéraire », où le paysage jouerait bien sur le premier rôle. Une telle ambition s’avère ainsi en totale incohérence avec « l’industrialisation des paysages » (P .A. J. Invasion éolienne au pays de Proust, 28 avril 2020)



Un maire déterminé donc, et qui ambitionne de développer à Illiers-Combray un véritable « tourisme littéraire », où le paysage jouerait bien sûr le premier rôle ? On ne peut que s'étonner...



Les Islériens n’ont reçu pour information que les pétitions des habitants des Dauffrais, réunis sur facebook « Non au méthaniseur au lieu-dit les Dauffrais, 28120, Illiers-Combray ». Une réunion d'information prévue en septembre 2020 vient d'être annulée par le maire, car les « porteurs du projet ne souhaitent pas rencontrer les habitants de la région. ».


Une consultation du public a été diligentée par la préfecture d'Eure et Loir, tout le monde peut s'y exprimer du lundi 31 août 2020 à 9 heures au lundi 28 septembre 2020 à 17h30.



Accéder à la consultation publique ICI.


Je souhaite que ce passage de La Recherche (« Il y avait autour de Combray deux "côtés" pour les promenades (...): le côté de Méséglise-la-Vineuse, qu'on appelait aussi le côté de chez Swann parce qu'on passait devant la propriété de M. Swann pour aller par-là, et le côté de Guermantes ») puisse être toujours d’actualité dans nos esprits lors des balades « du côté Swann », pour que ces lieux « souvenir d'une certaine image » ne deviennent pas le symbole des regrets d'un paysage défiguré.

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