
Il semblerait donc bien que la salle Napoleon à Bayonne, soit destinée à la démolition pure et simple, pour faire place à un immense bâtiment de 207 logements pour étudiants et saisonniers, entraînant dans sa chute les 2 autres bâtiments commerciaux adjacents. Les derniers bâtiments à l’architecture traditionnelle situés le long de l’Adour disparaissent peu à peu, au profit de blocs résidentiels à toits plats.

Il reste si peu de témoignages architecturaux de l’épopée Napoléonienne à Bayonne ( classée pour mémoire ville d’Art et d’Histoire ) que l’on peut se demander pourquoi la ville ne protège pas ce dernier vestige avec un projet de réhabilitation plus en phase avec le caractère patrimonial de défense de l’Histoire qu’elle revendique.
De plus, un tel projet, avec un nombre aussi important de logements, ne viendra que bouleverser la vie du quartier, avec des parkings et des bâtiments de grandes hauteurs.
Le permis de construire est à l’instruction. Les habitants surveillent cela de très près, et se disent prêts à agir en justice afin de préserver un pan d’histoire de leur ville et le caractère de leur quartier, si la municipalité validait ledit permis.
Leur inquiétude est justifiée, car le projet de cette résidence étudiante est vraiment démesuré, et ils ne voient pas du tout comment il est possible d’installer 207 logements sur ces superficies !
Un précédent projet immobilier n’avait pu obtenir de PC, alors qu’ il portait sur des surfaces de construction bien inférieures.

Espérons que la municipalité ne validera pas ce permis, afin de permettre à ce marqueur fort de l’identité de la ville de s’inscrire dans l’avenir.
Nous avons demandé à David Chanteranne, l’un des plus grands spécialistes de l’époque napoléonienne, de nous donner son avis quant à l’importance de préserver ce patrimoine.

David Chanteranne est historien, rédacteur en chef de la Revue du Souvenir Napoléonien, directeur des sites patrimoniaux de la ville de Rueil-Malmaison, il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur le Premier Empire et Napoléon, notamment L’insulaire. Les neuf vies de Napoléon (Le Cerf, 2015), Napoléon, Empereur de l’île d’Aix (Éditions du Trésor, 2021) et Les douze morts de Napoléon (Passés Composés, 2021, réédition Alpha poche, 2023). Il a signé, aux éditions Passés composés, Chroniques des territoires. Comment les régions ont construit la nation (2023).
« Dans le contexte de la guerre qui débute dans la Péninsule ibérique en 1808, la rencontre de Bayonne d’avril, entre Napoléon, le roi Charles IV d’Espagne et son fils Ferdinand, est un moment clé. L’Empereur des Français souhaite, par tous les moyens, faire renoncer à leurs droits ses anciens alliés pour installer son propre frère, Joseph, sur le trône. Le premier à se présenter est Ferdinand, que Napoléon tente d’amadouer. Puis, précédés de Godoy qui fait office de premier ministre, Charles IV et sa femme arrivent à Bayonne le 30 avril, dans l’espoir de bénéficier du soutien du glorieux chef de guerre. La mort dans l’âme, le roi renonce à ses droits sur la couronne et en exil, s’installant successivement à Fontainebleau, Compiègne, puis Marseille et enfin à Rome après 1811 à Rome. Son fils, futur Ferdinand VII, ne met pas longtemps à se décider, les menaces étant telles qu’il ne peut qu’accepter. Il est placé en résidence chez Talleyrand, au château de Valençay. Ce double renoncement est pris comme une provocation par les Espagnols. Cette rencontre de Bayonne provoque, dès le 2 mai, l’insurrection des Madrilènes, qui refusent que les infants ne quittent à leur tour la ville. Ce sont les émeutes du « Dos » et du « Tres de mayo » que le peintre Goya peint plus tard. La guerre d’Espagne sera un échec pour Napoléon et le début d’une véritable prise de conscience européenne contre le pouvoir impérial.
Les sites qui ont accueilli ces événements méritent d'être conservés, ils sont les souvenirs patrimoniaux de notre histoire européenne. »
À suivre...
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