Le patrimoine demande beaucoup d’attention, mais également, beaucoup d’implication financière de la part de tous ceux qui souhaitent lui donner un avenir. L’État et les collectivités ne peuvent pas tout et peuvent même de moins en moins. Par manque de volonté parfois, par manque de moyens souvent. Chaque mois, nous vous présenterons des projets pour lesquels la mobilisation citoyenne et celle des entreprises sont capitales pour espérer les voir se concrétiser.

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Mai 2020

Bordeaux
Une église oubliée du chemin de Saint Jacques de Compostelle en grand danger

Guilhem Pépin


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Né à Agen en 1976, issu d’une famille du Bordelais par son père et d’une famille alsacienne-lorraine par sa mère, Guilhem Pépin est passionné par l’histoire médiévale grâce à son père trop tôt disparu. Il s’est lancé depuis ses douze ans dans l’étude de la période médiévale de l’Aquitaine-Gascogne et du quart sud-ouest de la France, car la recherche historique sur la riche histoire politique et militaire de cet espace était quelque peu tombée en déshérence. Son parcours l’a ensuite amené à passer un doctorat d’histoire à la prestigieuse Université d’Oxford.

Par la suite, il fait partie de l’équipe du programme de recherche chargée de la publication en ligne en anglais du contenu des rôles gascons nommé « The Gascon Rolls Project » en étant employé par les universités d’Oxford, de Bordeaux-Montaigne et de Southampton (Royaume-Uni). Ce travail est sur le point de se conclure et consiste en la publication de résumés très détaillés en anglais de cette source essentielle concernant le duché d’Aquitaine (de 1273 à 1453) qui est de nos jours conservée aux Archives Nationales Britanniques (The National Archives, TNA) : www.gasconrolls.org (cliquez ensuite sur « Consultations » pour lire les rôles ou faite une recherche par mot dans le moteur de recherche situé en haut à droite de la page d’accueil)

L’ensemble de ce travail équivaut à approximativement 3200 pages imprimées et s’étend de l’année 1317 à l’année 1467, soit les années des rôles gascons qui n’avaient pas encore été publiés sous forme papier. Dans le cadre de ce programme de publication Guilhem Pépin fut chargé entre autres de la difficile tâche d’identification des personnes et des noms de lieux, certains étant très obscurs, se trouvant mentionnés dans cette série documentaire. Guilhem Pépin a aussi mené en parallèle des recherches sur l’Aquitaine « anglaise » et a dirigé deux colloques internationaux dont les actes ont été publiés. Il a également publié beaucoup de travaux sur la guerre de cent ans en Aquitaine-Gascogne et différents aspects de l’histoire médiévale de cet espace.

Etat actuel de l’édifice
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Le Collectif 1120 - Sauvons l'église Saint-Jacques de Bordeaux ! vient de se constituer à Bordeaux. Composé de citoyens de la ville ainsi que de sa métropole, et mené par Guilhem Pépin, historien médiéviste, docteur en histoire de l’Université d’Oxford, qui se bat pour la sauvegarde de cette église.

Malgré le fait que l’on vit une époque très concernée par la conservation et la transmission de notre patrimoine historique, il existe encore en plein centre de Bordeaux un monument ancien quasiment inconnu des Bordelais, qui est menacé d’être détruit faute d’une quelconque protection.

Le « garage » dans les années 1975/80

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C’est l’église de l’ancien hôpital Saint-Jacques de Bordeaux qui s’est occupé pendant des siècles de recueillir les pèlerins allant vers Saint-Jacques-de-Compostelle. Caché derrière une façade du XIXe siècle au 10 rue du Mirail, cet édifice du XVe siècle, comportant aussi des éléments s’étendant du XIIe au XIXe siècle, est sans doute le plus méconnu des monuments de Bordeaux.

Non classée aux monuments historiques ou à son inventaire supplémentaire, l'église est située hors du secteur sauvegardé de Bordeaux à quelques mètres près. Transformée en garage de voitures, cette magnifique église au rôle très symbolique, a vu la voûte de son chœur, comportant par ailleurs une superbe clé de voûte du XVe siècle représentant saint Jacques, s’écrouler il y a une quinzaine d’années. Heureusement, sa propriétaire n’a jamais voulu vendre cette clé de voûte, ainsi que cette église, malgré de nombreuses propositions avantageuses, alors qu’absolument rien ne l’empêchait de le faire.

Clé de voute encore présente dans l’édifice
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Toutefois, la situation actuelle, malgré la bonne volonté de sa propriétaire, ne peut continuer ainsi sans porter préjudice à la transmission de ce patrimoine exceptionnel aux futurs Bordelais.

C’est pour cela que le collectif 1120 s’est formé.

Bordeaux est déjà classée au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre des Chemins de Saint-Jacques de Compostelle grâce à trois de ses églises liées à ce pèlerinage, mais le paradoxe est que l’église la plus significative de ce pèlerinage n’y est pas incluse et est totalement ignorée des pouvoirs publics.

Le hasard fait que cette année est l’anniversaire de fondation de cette église et de son hôpital. En effet, c’est le 1er mars 1120 que le duc d’Aquitaine Guillaume IX, premier troubadour connu et grand-père d’Aliénor d’Aquitaine, a fondé cet hôpital pour les pèlerins de Saint-Jacques, avec son prévôt de Bordeaux nommé Guilhem de Bordeaux. Il y a donc exactement 900 ans cette année que l’hôpital Saint-Jacques de Bordeaux a été inauguré.

Clé de voute qui aurait été confiée au Musée d’Aquitaine après être tombée

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Le collectif 1120 – Sauvons l’église Saint-Jacques de Bordeaux ! a pour but de tout mettre en œuvre dans le cadre légal, afin de sauvegarder cette église pour les générations futures de Bordelais et les amoureux des chemins de Saint-Jacques. Une inscription à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques est le premier but à atteindre afin de protéger ce monument. Tout ceci sera mis en œuvre en coordination avec la propriétaire actuelle afin qu’elle puisse avoir les moyens de restaurer et maintenir ce patrimoine. Notre collectif va plaider pour que ce monument soit ouvert au public et aux Bordelais au moins pour les journées européennes du patrimoine qui se déroulent chaque année.

Il va donc interpeller les élus de Bordeaux et de sa métropole, ainsi que des personnes de la société civile, afin qu’ils prennent conscience de la situation et qu’ils puissent agir efficacement pour éviter la disparition de ce patrimoine bordelais inestimable.

Guilhem Pépin,
Porte-parole du collectif 1120
Bordeaux

Crédits photographiques :
photo 1 : Jean-Pierre Nicolas
photo 2 : anonyme