L'âme des objets
avril 2020
Le merveilleux en miniature au XVIIIe siècle
Scènes animées sur un éventail
Georgina Letourmy-Bordier


A l’heure des bijoux numériques où tout accessoire est connecté, l’éventail semble un peu désuet. Mais il n’est qu’à regarder les vitrines des boutiques de mode pour prendre conscience de sa place aujourd’hui. Utile et séduisant, l’éventail prend son envol ! Accessoire utile certes, mais surtout élégant, raffiné, éminemment féminin, l’éventail surprend. Ces décors sont variés, sans cesse renouvelés depuis la fin du XVIIe siècle et l’expansion de cet accessoire de mode en Europe. Conservé replié, il ne se dévoile qu’à la demande, gardant bien cachés entre ses panaches la feuille, la monture et leurs ornements. Il surprend plus encore et suscite l’émerveillement par les matières et l’extraordinaire dextérité des artisans qui les ont travaillées. La surprise est à son comble avec quelques objets d’exception datant des années 1780.
Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, la France concentre un très grand nombre d’artisans qui se dédient à l’éventail. Eventaillistes, peintres et tabletiers connaissent la concurrence d’autres pays comme l’Angleterre, la Hollande ou encore l’Italie. A Paris, les artisans rivalisent pour offrir sans cesse des objets du dernier goût. La nouveauté, dans les décors des feuilles, dans la sculpture des brins ou leur agencement, est fondamentale pour soutenir un commerce florissant. Des artisans virtuoses, malheureusement anonymes, innovent de manière inédite. Ils dotent les brins extérieurs, appelés « panaches », d’inventions inattendues. Leur coût n’est pas connu mais il est certain que la fabrication de tels petits « bijoux » était très restreinte. De telles inventions ingénieuses étaient réservées à de rares privilégiés.
Citons à titre d’exemple des verres optiques glissés dans les panaches faisant de l’éventail un auxiliaire quotidien, ou des tubes à parfum permettant de diffuser en s’éventant un léger effluve autour de soi. Certains écrits contemporains illustrent leur usage. Dans son Tableau de Paris, Louis-Sébastien Mercier (1740-1814) parle ainsi des lorgnettes : « Il y a des grimaces de mode. De là les lorgnettes encadrées dans le chapeau, dans l’éventail, et qu’on braque à tout propos » ! Aucun mémoire ou document n’est malheureusement connu aujourd’hui pour évoquer un éventail « à système animé », parfaite illustration de cette ébullition créative.
Caractéristique des éventails français des dernières années du XVIIIe siècle, il est composé d’une feuille en soie crème peinte d’une élégante et son oiseau. La composition est dotée d’un détail raffiné : les décors latéraux, comme les deux ombrelles, sont rehaussés par des aplats de soie appliquée. La monture est composée de brins en ivoire repercé dont le décor gravé est mis en valeur par des feuilles métalliques dorées. Mais la grande particularité de la monture réside dans la partie haute des panaches.
Si bien souvent cette partie est sculptée de personnages ou de fleurs, les modèles les plus riches présentent un portrait peint protégé par un verre à l’image des miniatures. Concernant notre exemple, le raffinement est plus grand encore. Le peintre a exécuté une petite scène qui s’anime à la demande !
Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, la France concentre un très grand nombre d’artisans qui se dédient à l’éventail. Eventaillistes, peintres et tabletiers connaissent la concurrence d’autres pays comme l’Angleterre, la Hollande ou encore l’Italie. A Paris, les artisans rivalisent pour offrir sans cesse des objets du dernier goût. La nouveauté, dans les décors des feuilles, dans la sculpture des brins ou leur agencement, est fondamentale pour soutenir un commerce florissant. Des artisans virtuoses, malheureusement anonymes, innovent de manière inédite. Ils dotent les brins extérieurs, appelés « panaches », d’inventions inattendues. Leur coût n’est pas connu mais il est certain que la fabrication de tels petits « bijoux » était très restreinte. De telles inventions ingénieuses étaient réservées à de rares privilégiés.
Citons à titre d’exemple des verres optiques glissés dans les panaches faisant de l’éventail un auxiliaire quotidien, ou des tubes à parfum permettant de diffuser en s’éventant un léger effluve autour de soi. Certains écrits contemporains illustrent leur usage. Dans son Tableau de Paris, Louis-Sébastien Mercier (1740-1814) parle ainsi des lorgnettes : « Il y a des grimaces de mode. De là les lorgnettes encadrées dans le chapeau, dans l’éventail, et qu’on braque à tout propos » ! Aucun mémoire ou document n’est malheureusement connu aujourd’hui pour évoquer un éventail « à système animé », parfaite illustration de cette ébullition créative.
Caractéristique des éventails français des dernières années du XVIIIe siècle, il est composé d’une feuille en soie crème peinte d’une élégante et son oiseau. La composition est dotée d’un détail raffiné : les décors latéraux, comme les deux ombrelles, sont rehaussés par des aplats de soie appliquée. La monture est composée de brins en ivoire repercé dont le décor gravé est mis en valeur par des feuilles métalliques dorées. Mais la grande particularité de la monture réside dans la partie haute des panaches.
Si bien souvent cette partie est sculptée de personnages ou de fleurs, les modèles les plus riches présentent un portrait peint protégé par un verre à l’image des miniatures. Concernant notre exemple, le raffinement est plus grand encore. Le peintre a exécuté une petite scène qui s’anime à la demande !

Dans les deux cas, le bras articulé des personnages est en ivoire découpé, en légère épaisseur par rapport au motif peint, et fixé par un minuscule rivet. Le bras peut être levé et descendu à l’envi en montant et en descendant un très petit bouton latéral. Placé très discrètement sur le côté gauche, sous le médaillon, il n’est visible qu’après une fine observation.

Lors de la restauration d’un de ces éventails, un mécanisme a été mis à jour permettant ainsi de comprendre son fonctionnement. Très rudimentaire, il n’a vraisemblablement pas demandé l’intervention d’un horloger mais simplement d’un artisan habile et ingénieux. Logée dans l’épaisseur du brin, d’environ 4 mm, une fine languette métallique est reliée au bouton extérieur. En poussant ce bouton, la languette qui déplace le bras est entrainée. L’effet d’animation est simple et immédiat.
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De tels objets précieux témoignent à la fois de l’imagination des éventaillistes français, et de l’innovation nécessaire pour combler une cliente exigeante en quête de merveilleux. Miniature et mécanique réunies offraient ainsi aux élégantes une animation sans équivalent, suscitant l’émerveillement et la surprise… comme il le fait encore aujourd’hui !


Crédits photographiques : Coutau-Bégarie et associés