Cursus
Mars 2020


Stéphane Baumeige
Architecte du patrimoine


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Nom : Baumeige
Prénom : Stéphane
Âge : 54ans
Lieu de résidence : Marseille
Adresses Professionnelles :
88 rue Grignan – 13001 Marseille
331 la Casse – 05340 Vallouise
Site internet :
www.arpegearchitecture.com

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La Gazette du Patrimoine : Tout d’abord pouvez-vous nous dire en quoi consiste exactement le métier d’architecte du patrimoine ?

Stéphane Baumeige : L’architecte du patrimoine intervient comme tous les architectes, par des missions de maitrise d’œuvre, des missions d’études, de programmation, d’assistance à maitrise d’ouvrage, de conseil, de formation, d’enseignement, sur des cas où le « patient » présente un intérêt qui justifie sa conservation, également une fragilité particulière en raison de son âge, de son état de délabrement, et lorsque la question de sa transmission est posée. Le patient peut être Notre Dame de Paris, comme une petite cuillère, un quartier délabré, une ville oubliée…

La Gazette du Patrimoine : Quelles sont les particularités de votre métier par rapport à un architecte « classique » ?

Stéphane Baumeige : L’architecte dit « du patrimoine » porte un regard particulier sur le contexte, qui est un élément fondamental du projet. Contexte bâti, paysager, social, culturel, historique, le regard est avant tout dans le souci de la gestion des transformations de ces contextes, qui ne sont jamais immuables.

La Gazette du Patrimoine : Pouvez-vous nous expliquer quelles sont les différences entre architecte du patrimoine et architecte des bâtiments de France ?

Stéphane Baumeige : L’Architecte des bâtiments de France, est un agent public de l’état, dont la mission de service public consiste principalement à intervenir dans des zones de sensibilité patrimoniale avérées (abords de MH, AVAP, sites protégés) sous la forme de délivrance d’avis conformes (simples sur certains cas) formulés lors de l’instruction administrative des opérations d’aménagement, donnant lieu à constitution de dossiers. Il est la plupart du temps un Architecte Urbaniste de l’Etat avec spécialité Patrimoine, et à ce titre, a suivi le cursus de l’école de Chaillot. Il est donc un architecte du patrimoine, qui a suivi un cursus particulier de titularisation. L’Architecte du Patrimoine au sens large, est un architecte diplômé de l’école de Chaillot. S’il n’est pas ABF (grande majorité des cas), il est donc un architecte inscrit à l’ordre, comme tous ses confrères, et il exerce la profession sous des formes diverses, en libéral, en associé de SARL, en salarié d’une collectivité.

La Gazette du Patrimoine : Quelles sont les études que vous avez suivies avant de pouvoir exercer ?

Stéphane Baumeige : J’ai suivi, entre 1985 et 1992, le cursus classique qui délivrait le diplôme d’architecte dplg. Diplômé en 1993 de retour du service militaire dans le service du génie (possibilité rare à trouver alors, qui était réservée aux étudiants architectes et ingénieurs), après quelques années d’errance et d’essais professionnels dans des directions différentes, j’ai suivi le cursus de l’école de Chaillot entre 1997 et 1999. J’y ai alors été diplômé « architecte du patrimoine ». 

La Gazette du Patrimoine : Quand avez-vous su que vous exerceriez ce métier et pas un autre ?

Stéphane Baumeige : Dès le 1e jour du cours de Chaillot, lorsque je rencontrai successivement Fraçoise Choay et Jean Marie Pérouse de Montclos, le destin était scellé… et je ne connaissais pas encore Jean Louis Taupin, Benjamin Mouton, Alexandre Melissinons, Michel Brodovitch, Nicolas Faucherre… des révélations à chaque session, nous buvions les paroles…

La Gazette du Patrimoine : Quelle fut votre toute première mission en tant qu’architecte du patrimoine ?

Stéphane Baumeige : De 1999 à 2001, en tant que prestataire de service pour l’ACMH compétent à Marseille, je découvre alors le recollement documentaire, les rencontres et les échanges avec les historiens et les chercheurs, toujours au service des architectes du patrimoine. Là encore, des révélations. En 2001, ma première mission de maitrise d’œuvre personnelle, avec mission complète des études préalables à la livraison sur un petit objet sensible en haut de la Montagne Sainte-Victoire : la Croix de Provence, visible de quasi-toute la Provence par beau temps.

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La Gazette du Patrimoine : Quel est le plus beau souvenir de votre carrière jusqu’alors ?

Stéphane Baumeige : L’enseignement devant un amphithéâtre de 200 étudiants, et les emmener au pied de la statue équestre de Marc Aurèle au Capitole, regarder une composition architecturale et comprendre qu’il y a des moments magiques dans l’histoire de ce métier, où l’art, la science et la technique se rencontrent.

La Gazette du Patrimoine : Et, bien entendu, quel est le pire ?

Stéphane Baumeige : Plusieurs, et ils sont récurrents : le moment-type où on réalise qu’on ne parle pas le même langage avec un maitre d’ouvrage, ou une entreprise qu’on n’a pas forcément choisie. Et où l’ignorance et le manque de savoir-faire, va rendre le travail extrêmement difficile. Mais je n’ai jamais ni renoncé, ni abandonné, une opération qui a démarré.

La Gazette du Patrimoine : Vous êtes très critique par rapport aux travaux effectués sur certains édifices, qu’avez-vous à dire à ceux qui ne respectent pas les règles élémentaires de restauration ?

Stéphane Baumeige : N’hésitez pas à dire que vous ne savez pas faire, appelez et laissez faire ceux qui savent…

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La Gazette du Patrimoine : Demain, on vous donne la possibilité d’écrire une loi afin de faire respecter un peu plus le patrimoine, quelle serait-elle ?

Stéphane Baumeige : Le préambule : « La démolition est une preuve d’échec. Toutes les actions, études, mesures, dispositions doivent être prises pour éviter une démolition. » C’est bref mais ça donne l’idée. La loi devrait s’inspirer de la réalité physique du cycle de vie d’un bâtiment, dont on démontre assez facilement que sur une période de 150 à 200ans, le surcout de 3 réhabilitations sérieuses, est inférieur à 5 démolitions + reconstructions, ce qui est la norme sur cette période de temps. On construit pour 30 ans maximum actuellement, on ne garantit contractuellement que 10 années. L’architecture est devenue normative, assurantielle et fiscale très souvent.

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La Gazette du Patrimoine : Quelles relations entretenez-vous avec les ABF en particulier et la DRAC en général ?

Stéphane Baumeige 
: De très bons rapports. Je suis toujours en demande de leur regard sur mes projets, regards sans concession, c’est ce que j’attends d’eux, ils sont souvent le dernier rempart pour garantir une certaine qualité de restauration, la conduite du projet architectural est bien souvent une lutte permanente contre sa dégradation…

La Gazette du Patrimoine : Si vous n’aviez pas choisi ce métier, qu’auriez-vous aimé faire ?

Stéphane Baumeige : Guide de Haute Montagne. Un métier ou on emporte des gens quelque part, ou conducteur de trains, ou n’importe quelle activité où l’on doit détenir un savoir, pour conduire quelque chose vers quelque part…

La Gazette du Patrimoine : En dehors de votre vie professionnelle, y a-t-il quelque chose qui vous passionne ?

Stéphane Baumeige : Oui, rêver devant un paysage qui respire…

La Gazette du Patrimoine : Si c’était à refaire, recommenceriez-vous ce même parcours ?

Stéphane Baumeige : Sans hésiter.

La Gazette du Patrimoine : Votre définition du mot patrimoine ?

Stéphane Baumeige : Ce qui est important, et qui doit être transmis, même si on le modifie un peu.

La Gazette du Patrimoine : Dans 20 ans, vous vous imaginez comment ?

Stéphane Baumeige : Rêvant devant un paysage qui respire…

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Crédits photographiques : Stéphane Baumeige