Traditions
Mars 2020


La fête des Argentins à Boulogne-sur-Mer
Sylvie Desrousseaux


Stacks Image 551
Née à Boulogne-sur-Mer le siècle dernier, Sylvie Desrousseaux déménage à Lille à l’âge de 15 ans, suite au changement de carrière de son père.  Après des études de secrétariat, elle ouvre un petit magasin de brocante dans le vieux Lille avec le soutien de ses parents, tous deux passionnés par les objets, les meubles et les collections, la carte postale et le livre régional. Elle rencontre son futur époux, ingénieur en bâtiment, passionné de brocante et de vieux papiers également. Mais la nostalgie de sa petite ville portuaire au riche passé historique ne la quitte pas, et elle y est revenue y vivre avec bonheur, il y a 2 ans. Elle connaît les moindres détails de l’histoire de la ville de Boulogne et de ses riches traditions. Voici l’une d’entre-elles, qui nous invite à un voyage en Argentine, entre devoir de mémoire et traditions populaires.

Stacks Image 687
Boulogne-sur-Mer est connue pour être le premier port de pêche de France, pour son marché aux poissons sur les quais le matin, et pour le charme de sa Haute-Ville historique, ses remparts, son château fort, son beffroi, ses places et ruelles pavées, ses demeures napoléoniennes, sa procession et ses églises, sa cathédrale, sa Vierge Nautonnière et les pèlerinages en son honneur qui s'y déroulent depuis des siècles, recevant tour à tour les rois de France (pour n'en citer que quelques-uns parmi les 14 qui sont venus : Philippe Auguste, François Ier, Henri II qui racheta la ville aux anglais, Louis XIV..) et les rois anglais, dont Henri VIII.

Stacks Image 734
Balzac, Victor Hugo, Charles Dickens... et de nombreux peintres (Manet, Delacroix...) et artistes (les frères Coquelin..) l'ont aussi fréquentée ou y sont nés. C'est à Boulogne également que Jules César, l'Empereur Claude et Napoléon Ier rêvèrent de conquérir la blanche Albion.

Mais Boulogne est aussi un curieux lieu de pèlerinage pour les nombreux Argentins qui affluent pour visiter la « Casa San Martin », dernière demeure du General José de San Martin, né en 1778, libérateur des pays d'Amérique du sud (Argentine, Pérou, Chili) du joug espagnol au XIXe siècle, ce qui engendra un grand tournant géopolitique.

Le Général, après sa grande carrière militaire et politique en Argentine, décida de profiter d'une retraite paisible avec sa famille en France. Cependant, à Paris, les événements de 1848 l'incitèrent à se rapprocher d'un endroit propice à un éventuel départ en Angleterre pour mettre sa famille à l'abri. Et c'est ainsi qu'il découvrit la jolie ville de Boulogne du XIXe siècle, et son hospitalité. Il s'y établit tout de suite en 1848. Il aimait se promener sur le bord de mer, le long de la Liane et dans le joli jardin public des Tintelleries, haut lieu de festivités bals et concerts.

En montant la colline qui mène à la Haute Ville on trouve sur la gauche, au 113 de la Grand Rue, une belle maison bourgeoise transformée en musée, notifiée par un petit panneau et un drapeau argentin. Ce fut la dernière demeure de San Martin, décédé en 1850, à l'âge de 72 ans.

Stacks Image 770

Stacks Image 739
La maison a été acquise par le gouvernement argentin en 1926, et fut même un moment le consulat de ce pays.

Elle ressemble beaucoup à ce qu'elle était quand le général y vivait : collection d'armes, d'uniformes, peintures et objets rares...

Dans la petite cour à l'arrière se trouvent les plaques envoyées par ceux qui honorent toujours la mémoire d'El Libertador.

Stacks Image 792

Dernièrement, en 2018, une cérémonie eut lieu au pied de la très belle statue équestre de San Martin, située au bord de la plage de Boulogne, pour la commémoration des 168 ans du décès du Général, avec les officiels argentins et le maire de Boulogne.

Cette statue, d'ailleurs, échappa miraculeusement aux bombardements de la Deuxième guerre mondiale, alors que la basse ville a été détruite à 70%.

À ce jour, les soins et la conservation du musée sont attribués tous les deux ans à un membre des forces armées argentines. Chaque année une cérémonie de commémoration a lieu au musée. Le corps du Général San Martin a été enterré dans la magnifique grande crypte restaurée de la cathédrale Notre Dame, à côté du trésor. Une plaque indique l'emplacement et une salle lui est consacrée
Il y a encore peu, tous les 2 ans, le superbe voilier école militaire Le Libertad venait dans le port de Boulogne et une parade des élèves avait lieu dans les rues. Ses visites sont, hélas, désormais plus aléatoires.

Stacks Image 796

Stacks Image 787

Ses restes furent ensuite rapatriés à Buenos Aires, selon ses dernières volontés, et en remerciements pour la ville qui prit soin de lui lors de ses dernières années, une rue et une banlieue portent le nom de Boulogne-sur-Mer à Buenos Aires.

Crédits Photographiques :
1-2-6-7-8 : Sylvie Desrousseaux
4:
La Voix du Nord
3 et 5 : Ambassade de France