Traditions
Janvier 2020


Au gui l'an neuf


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Même si elle se perd un peu, la tradition de s’embrasser sous le gui, lors du réveillon du nouvel an, pour se souhaiter bonheur et prospérité est toujours bien présente. Mais d’où nous vient cette tradition ?

Il est fort probable que nos ancêtres les Gaulois en soient à l’origine. Pour eux, c’était une plante sacrée. Son nom signifierait « celui qui guérit tout ».

Ils attribuaient donc au gui des vertus médicinales et surtout d’immortalité, car, même en hiver, ses feuilles restent vertes. C’est lors du solstice d’hiver que les druides, vêtus de blanc, cueillaient le gui à l’aide d’une serpe d’or, en prononçant en langue celte « O ghel an heu », que l’on peut traduire par « Que germe le blé ». Cette expression, est le symbole de la renaissance du soleil après le solstice d’hiver. Un fois coupé, les druides offraient le gui aux villageois lors d’une grande cérémonie. Le gui devait alors leur porter bonheur toute l’année nouvelle et assurer l’abondance des récoltes ainsi que la fécondité des femmes. Il devait également protéger les hommes contre la sorcellerie, car les druides croyaient que le gui était semé sur les chênes par une main divine et voyaient, dans d’union de leur arbre sacré et ces rameaux toujours verts, un symbole d’immortalité.

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On ne peut pas faire référence aux Gaulois, sans évoquer les Romains. César dans la célèbre Guerre des Gaules écrit au sujet de cette cérémonie :
 
« Le gui est fort difficile à trouver. Quand on l'a découvert, les druides vont le chercher avec respect et toujours le sixième jour de la lune, jour si révéré par eux qu'il est le commencement de leurs mois, de leurs années, de leurs siècles même, qui ne sont que de trente ans. » 

L’histoire raconte que lorsque des ennemis se croisaient sous une boule de gui dans les bois, ils se devaient de faire une trêve d’un jour en déposant leurs armes, avant de repartir au combat. De là vient sans doute la coutume de suspendre une boule de gui au plafond le jour de l’an et de s’embrasser dessous en signe d’amitié.

Il existe une autre version des origines de cette coutume : les gaulois, qui avaient peur que le ciel ne leur tombe sur la tête, pensaient que si une seule boule de gui tombait par terre, la malédiction allait s’abattre sur eux. C’est d’ailleurs pour cette raison que, lors de la cérémonie de la cueillette, un drap blanc était tendu afin qu’aucune boule ne touche le sol.

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La parole druidique « O ghel an heu » s’est transformée au fil des siècles pour devenir au Moyen Âge « Au gui l’an neuf ».

À cette époque, on accrochait le gui aux portes des maisons pour éloigner les mauvais sorts.

La tradition a perduré même bien après l’essor du christianisme, même si l’église préféra remplacer gui par le houx, dont les boules rouges rappellent le sang du Christ et les feuilles piquantes, la couronne d’épines.

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Cette tradition a même été transportée par les colons jusqu’en Amérique où elle est toujours vivante.

Même si ses origines païennes ont été quelque peu oubliées, la coutume d’échanger un baiser sous un rameau de gui, en gage de bonheur et de paix, est toujours bien présente dans de nombreux pays. De même que, si un couple d’amoureux s’embrasse sous une boule de gui, la tradition veut qu’ils se marient dans l’année.


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D’un point de vue purement botanique, le gui (Viscum album) est un arbrisseau parasite de la famille des Loranthacées. Déposés par les oiseaux (essentiellement par les grives) qui frottent leur bec chargé de graines sur les rameaux, il émet de petites racines que l’on nomme suçoirs, qui pénètrent dans l’écorce et le cœur du bois. Le gui se nourrit ainsi de la sève de son support et l’épuise.

Utilisé autrefois en herboristerie pour soigner un grand nombre de troubles, comme l’épilepsie, les troubles nerveux et même la coqueluche, il fait l’objet encore aujourd’hui de nombreuses recherches scientifiques, notamment pour démontrer ses bienfaits sur le système immunitaire et contre l’hypertension artérielle. Il aurait même la capacité d’inhiber certaines tumeurs cancéreuses.

En revanche, si vous souhaitez passer une belle nouvelle année, il est fortement déconseillé de l’ingérer, car le gui est une plante d’une grande toxicité à forte dose.


Quoi qu’il en soit, s’embrasser sous le gui reste une belle tradition en ce début d’année.

La chanson du gui

Le soir étend sur les grands bois
Son manteau d’ombre et de mystère ;
Les vieux menhirs, dans la bruyère
Qui s’endort, veillent et des voix
Semblent sortir de chaque pierre.
L’heure est muette comme aux temps
Où, dans les forêts souveraines,
Les vierges blondes et sereines
Et les druides aux cheveux blancs
Allaient cueillir le gui des chênes.
Réveillez-vous, ô fiers Gaulois,
Jetez an loin votre suaire
Gris de la funèbre poussière
De la tombe et, comme autrefois,
Poussez votre long cri de guerre
Qui fit trembler les plus vaillants,
Allons, debout ! brisez vos chaînes
Invisibles qui vous retiennent
Loin des bois depuis deux mille ans.
Allez cueillir le gui des chênes.
Barde, fais vibrer sous tes doigts
Les fils d’or de la lyre altière,
Et gonfle de ta voix de tonnerre
Pour chanter plus haut les exploits
`Des héros à fauve crinière
Qui, devant les flots triomphants
Et serrés des légions romaines
Donnèrent le sang de leurs veines
Pour sauver leurs dieux tout puissants
Et le gui sacré des grands chênes.
Gaulois, pour vos petits-enfants,
Cueillez aux rameaux verdoyants
Du chêne des bois frissonnants
Le gui aux feuilles souveraines
Et dont les vertus surhumaines
Font des hommes forts et vaillants
Cueillez pour nous le gui des chênes.

Gaston COUTÉ
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