Martinique : fin de 200 ans d’histoire pour « l’Habitation Union »

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Nous avons eu connaissance des faits, hélas bien trop tard. Bientôt les pelleteuses viendront dévorer cet édifice construit au début du XIXe siècle, certes non protégé au titre des Monuments Historiques, mais dont la valeur patrimoniale était pourtant incontestable.

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L'Habitation Union est une habitation sucrière située à Sainte-Marie en Martinique. L'habitation se situe à 1, 5 kilomètre du bourg de Sainte-Marie. Elle est référencée à l’inventaire général, accessible par ce lien ICI

Il s'agit à l’origine d'un ensemble de terres, au relief accidenté, aujourd'hui constitué de grandes surfaces plantées en canne et de lotissements depuis les années 50. La plupart des anciens bâtiments sont en ruines, hormis la maison principale qui date du début du XIXème siècle — et qui était encore récemment habitée —, l'écurie (certainement anciennement purgerie) et une ancienne case dont subsiste le soubassement. Les ruines de la sucrerie, des cases à bagasse, de la salle des machines, de la digue ont été intégrées dans des constructions privées datant du dernier quart du XXe siècle. Une occupation amérindienne est aussi attestée dans la zone : des objets amérindiens provenant de l'Habitation Union sont conservés au National Museum of the American Indian (Washington), et tout près de l'habitation se trouve le site amérindien de La Salle (ou Lassalle) [sources: Sébastien Perrot-Minnot/Eveha]

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La maison de maitre de l’habitation située aujourd’hui sur un terrain d’environ 5000 m² va disparaître, ainsi que deux dépendances. Elle a fait l’objet d’une cession à promoteur pour la construction en vente en l’état de futur achèvement (VEFA) de 52 logements destinés à être acquis par un bailleur social.

Le permis de construire a été délivré par la Ville, sans aucun souci de la valeur patrimoniale et archéologique du lieu. L’habitation n’étant pas inscrite à l’inventaire des Monuments Historiques, la Direction des Affaires Culturelles n’a pas été saisie du projet, ni pour la protection patrimoniale, ni pour les fouilles archéologiques (alors que des vestiges amérindiens y sont sans doute présents).

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C’est donc une nouvelle partie de l’histoire précolombienne et coloniale de la Martinique, histoire certes douloureuse, mais témoignage indispensable, qui va disparaître. C’est aussi un patrimoine bâti essentiel, au-delà de sa valeur historique et mémorielle, pour le développement touristique de la Martinique, auquel on porte une nouvelle fois atteinte.

Ni les associations locales qui se sont mobilisées sur le sujet, ni les services de l’Etat, n’ont donc pu arrêter ce projet qui met en avant l’activité économique du BTP et le besoin de logements sociaux (sur un territoire qui perd pourtant près de 4000 habitants chaque année et où la vacance et la désertification des centres bourgs atteignent des niveaux records).

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Il est sans doute trop tard pour faire stopper ce chantier comme en témoignent les photos que nous avons pu recueillir, mais si au moins ce nouveau cas dramatique de destruction patrimoniale pouvait servir d’exemple et contribuer à mettre fin à l’abandon de la mémoire collective en Martinique, l’Habitation Union n’aurait pas disparu pour rien !

Consulter la notice de l’inventaire général ICI.


Crédits photographiques: La Gazette du Patrimoine. Photos 3 et 4 : Sébastien Perrot-Minnot/Eveha